Conversation avec Alain Ducasse

13 Mars 2019


par Aude Camus 
 
La semaine dernière, le Chef Alain Ducasse était à Hong Kong pour accueillir Guillaume Katola, le nouveau Chef Exécutif du restaurant étoilé Rech by Alain Ducasse. Guillaume est tout sauf un nouveau venu dans la famille Ducasse et il arrive à Hong Kong fort d’une dizaine d’années d’expérience dans les restaurants du Chef, de l’étoilé Jules Verne à la Tour Eiffel en passant par Benoit à Paris ou Ore à Versailles. Une belle excuse pour bientôt retourner chez Rech by Alain Ducasse  que j’adore ! 
 
Invité au cocktail d’accueil organisé pour Guillaume et sachant que l’iconique Alain Ducasse serait en ville j’ai tenté ma chance et joué le culot, demandant à son attachée de presse si je pouvais voler quelques minutes du temps précieux du Chef aux 30 restaurants dans 7 pays du monde et aux 21 étoiles. Requête acceptée, je me retrouvais donc le lendemain à partager 30 min de la vie d’Alain Ducasse. 

 

(c): Pierre Monetta
(c): Pierre Monetta
Bonjour Alain Ducasse, merci de me recevoir. Vous avez aujourd’hui une trentaine d’établissements à travers 7 pays, pourquoi avoir fait en 2003 le pari/le choix d’ouvrir un restaurant à Hong Kong ?
Si je ne dis pas de bêtise, je crois qu’on était les premiers expatriés à Hong Kong il y a 15 ans. J’aimais beaucoup Hong Kong, j’étais déjà venu et j’étais même resté dans cet hôtel il y a 30 ans quand c’était encore le Regent (ndlr : l’Intercontinental Hong Kong sera d’ailleurs de nouveau renommé Regent Hong Kong après des travaux de grandes envergures qui seront entrepris en 2020). J’étais venu faire un repas dans ce lieu même. Et quelques années plus tard ils me proposent l’endroit. 
 
C’est donc l’Intercontinental Hong Kong qui est venu vous chercher ?
Oui parfaitement.
 
Hong Kong c’était le premier pays d’Asie où vous ouvriez une adresse ?
On a ouvert Tokyo à peu près en même temps, je ne sais plus vraiment si c’était avant ou après. 
Moi j’aime bien être le premier. J’aime faire le pari d’une destination. Une destination je n’ai pas envie d’y aller en quinzième ou en vingtième. Il y a une dynamique incroyable à Hong Kong et on est arrivés au bon moment. L’évolution qui s’est faite ici sur la restauration est incroyable. Ce n’est pas une évolution c’est même une révolution. 
 

(c): Pierre Monetta
(c): Pierre Monetta
Vous avez commencé en 2003 avec Spoon avant de changer de concept pour ouvrir Rech by Alain Ducasse en 2017. Pourquoi ce changement ? Et pourquoi ce concept, de fruits de mer, plutôt qu’un autre ?
Un concept il dure une douzaine d’années. Il était temps de changer. Moi j’aime bien le pari d’une autre proposition. Et les Hongkongais sont friands de poissons et de fruits de mer donc l’idée était de leur proposer une autre façon de les déguster. Pour moi cela faisait du sens. Et le décor s’y prêtait avec cette vue incroyable sur le Victoria Harbour. 
 

(c): Pierre Monetta
(c): Pierre Monetta
Vous travaillez beaucoup dans vos restaurants sur la saisonnalité des produits et sur les produits locaux mais ici vous proposez un restaurant de poissons et fruits de mer Français, cela ne va-t-il pas à l’encontre de ce que vous essayez de faire dans vos autres adresses ? 
On a des produits locaux ici mais c’est vrai que la plupart des produits sont importés. On ne prend des produits locaux que s’ils sont de la qualité des produits que l’on pourrait importer. Ici on se veut Français et on travaille à 80% sur des produits Français. Tous les pays ne se prêtent malheureusement pas à un sourcing local. Au Japon notre sourcing est essentiellement local car le Japon est un pays au terroir très riche, avec des produits de la terre et des produits de la mer qui sont incroyables. Mais nous sommes intraitables sur la traçabilité de nos produits. Partout dans le monde nous savons d’où viennent nos produits. Et nous donnons cette information au consommateur qui est de plus en plus attentif à ce genre de questions. La qualité du sourcing est importante.
 
Vous venez 3-4 fois par an à Hong et Macau, connaissez-vous un peu les autres chefs étoilés présents à Hong Kong ?
Je connais Richard Ekkebus (ndlr : Executive Chef d’Amber à The Landmark, Mandarin Oriental) depuis des années. Richard n’est pas Français mais il est ambassadeur de la cuisine Française. Je connais aussi Guillaume Galliot  au Four Seasons. 
 
Si vous deviez me recommander un restaurant à Hong Kong (en dehors de Rech by Alain Ducasse évidemment) ?
Moi j’aime beaucoup Ho Lee Fook. Jowett (ndlr : Executive Chef d’Ho Lee Fook) est un garçon avec une tonicité, une expression d’une cuisine métisse, j’aine sa cuisine pêchue et libérée. J’aime aussi beaucoup l’endroit et son atmosphère. 
 
En parlant de métissage de cuisine, est-ce que c’est une direction que vous pensez prendre un jour en vous inspirant des pays où vous avez des adresses ?
Non. Je reste Français. Je ne vais pas aller me mettre en compétition avec des chefs qui ont un savoir-faire unique et je préfère perfectionner mon propre savoir-faire unique.  
 
Des plans d’ouverture à Hong Kong ou ailleurs ?
Pas à Hong Kong, non. Hong Kong c’est une adresse et ça restera comme cela. Mais nous ouvrons Singapour, au Raffles Hotel, avant la fin de l’année, et Bangkok. 
 

 



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