Interview par Aude Camus
Si vous me suivez sur Instagram, vous l’avez sûrement remarqué : j’ai mis à profit mon congé maternité ces derniers mois pour redécouvrir Hong Kong. Marcher au hasard, le nez au vent, m’arrêter dans un cha chaan teng pour un Hong Kong Milk Tea glacé, arpenter des quartiers que je ne prends pas le temps d’explorer habituellement, m’imprégner de l’histoire de la ville et des communautés qui la façonnent, ou encore apprécier l’artisanat local, comme dans ce dernier atelier où la porcelaine est encore peinte à la main.
Pour nourrir mes explorations, je me suis appuyée sur des recherches en ligne… mais aussi sur des livres. C’est ainsi que j’ai découvert la sortie de Hong Kong à la Carte.
Si vous me suivez sur Instagram, vous l’avez sûrement remarqué : j’ai mis à profit mon congé maternité ces derniers mois pour redécouvrir Hong Kong. Marcher au hasard, le nez au vent, m’arrêter dans un cha chaan teng pour un Hong Kong Milk Tea glacé, arpenter des quartiers que je ne prends pas le temps d’explorer habituellement, m’imprégner de l’histoire de la ville et des communautés qui la façonnent, ou encore apprécier l’artisanat local, comme dans ce dernier atelier où la porcelaine est encore peinte à la main.
Pour nourrir mes explorations, je me suis appuyée sur des recherches en ligne… mais aussi sur des livres. C’est ainsi que j’ai découvert la sortie de Hong Kong à la Carte.
Plus qu’un livre de cuisine, il raconte l’histoire et la culture de la ville à travers ses recettes emblématiques et les récits croisés de ses autrices : Davina Chang, Hongkongaise vivant à Paris et fondatrice d’un café qui met à l’honneur milk tea, egg tart et pineapple bun dans le troisièm arrondissement, et Ada Deschanel, Française tombée amoureuse du Port Parfumé et qui revient régulièrement à Hong Kong, jusqu’à imaginer s’y installer un jour.
Heureux hasard du calendrier, Ada était justement à Hong Kong pour promouvoir le livre lorsque j’ai pu m’asseoir avec elle autour d’un café, échanger sur nos visions de cette ville que nous aimons tant et découvrir ce qui l’a poussée à écrire ce récit si personnel et vivant.
Heureux hasard du calendrier, Ada était justement à Hong Kong pour promouvoir le livre lorsque j’ai pu m’asseoir avec elle autour d’un café, échanger sur nos visions de cette ville que nous aimons tant et découvrir ce qui l’a poussée à écrire ce récit si personnel et vivant.
Tu as raconté que Hong Kong t’avait sauvée à un moment difficile. Comment tout a commencé ?
Complètement. Il y a deux ans et demi, juste après le Covid, j’étais en pleine séparation, en plein burn-out. J’ai pris un billet sur un coup de tête et j’ai envoyé un message au parrain de mon frère qui vit aussi et grâce auquel j’avais déjà découvert, et adoré, la ville pré-pandémie : “Je ne vais pas bien, est-ce que je peux venir la semaine prochaine ?” Il m’a dit oui sans hésiter.
J’ai passé vingt jours ici… et je n’avais plus envie de rentrer en France. C’était presque physique : je me sentais bien, apaisée, vivante.
Quand je suis rentrée, l’idée de m’installer ici a commencé à germer — au point que je suis revenue deux mois après pour vérifier si c’était un vrai sentiment ou juste une lubie.
Et c’est là que tu rencontres Davina ?
Oui ! De retour à Paris, je cherchais un café hongkongais, un vrai. Je tombe sur le café de Davina (ndrl : Bing Sutt au 22 rue Béranger, 75003) … mais le jour où j’arrive, la rue est en travaux, la pâtissière est malade, il n’y a rien à manger. On a papoté pendant des heures. Je suis revenue le lendemain — toujours rien à manger — puis le surlendemain où j’ai tout dévalisé.
En quinze jours, c’est devenu mon QG : j’y travaillais, j’y amenais mes potes, ma famille… C’est né comme ça.
Et l’idée du livre ? C’est arrivé vite ?
Complètement. Il y a deux ans et demi, juste après le Covid, j’étais en pleine séparation, en plein burn-out. J’ai pris un billet sur un coup de tête et j’ai envoyé un message au parrain de mon frère qui vit aussi et grâce auquel j’avais déjà découvert, et adoré, la ville pré-pandémie : “Je ne vais pas bien, est-ce que je peux venir la semaine prochaine ?” Il m’a dit oui sans hésiter.
J’ai passé vingt jours ici… et je n’avais plus envie de rentrer en France. C’était presque physique : je me sentais bien, apaisée, vivante.
Quand je suis rentrée, l’idée de m’installer ici a commencé à germer — au point que je suis revenue deux mois après pour vérifier si c’était un vrai sentiment ou juste une lubie.
Et c’est là que tu rencontres Davina ?
Oui ! De retour à Paris, je cherchais un café hongkongais, un vrai. Je tombe sur le café de Davina (ndrl : Bing Sutt au 22 rue Béranger, 75003) … mais le jour où j’arrive, la rue est en travaux, la pâtissière est malade, il n’y a rien à manger. On a papoté pendant des heures. Je suis revenue le lendemain — toujours rien à manger — puis le surlendemain où j’ai tout dévalisé.
En quinze jours, c’est devenu mon QG : j’y travaillais, j’y amenais mes potes, ma famille… C’est né comme ça.
Et l’idée du livre ? C’est arrivé vite ?
Très vite. J’avais un trou dans mon planning et j’ai proposé à mon éditeur de leur soumettre des idées. Je leur dis, un peu au hasard : “Et si je faisais un livre sur Hong Kong ?” Je pensais que ce serait un non immédiat — Hong Kong, en France, ça reste niche. Et finalement ils m’ont dit : “Ok, mais ça va être chaud.”
Le même jour, j’en parle à Davina : “Tu veux faire un livre avec moi ? On se connaît depuis un mois, mais bon…” Elle a dit oui tout de suite. Elle-même rêvait d’écrire un livre sans savoir par où commencer.
Tu n’avais aucune connaissance de la cuisine hongkongaise au début, si ?
Aucune. Les premières fois où je suis venue, j’ai fait comme beaucoup : restos d’expats, coffee shops, étoilés… Et puis un jour, je me suis dit : non mais attends, il y a forcément plus.
C’est en partant en hike dans les New Territories que j’ai commencé à entrer dans des cha chaan teng, sans même savoir que c’en était. Je goûte un pineapple bun — que j’ai longtemps cru à la banane, comme tout le monde — puis les milk teas, les toasts au pain de mie, les curry fish balls… Et de fil en aiguille, je me suis prise de passion pour tout ça.
Le livre suit le rythme d’une journée, du petit-déjeuner au soir. Pourquoi ce choix ?
Le même jour, j’en parle à Davina : “Tu veux faire un livre avec moi ? On se connaît depuis un mois, mais bon…” Elle a dit oui tout de suite. Elle-même rêvait d’écrire un livre sans savoir par où commencer.
Tu n’avais aucune connaissance de la cuisine hongkongaise au début, si ?
Aucune. Les premières fois où je suis venue, j’ai fait comme beaucoup : restos d’expats, coffee shops, étoilés… Et puis un jour, je me suis dit : non mais attends, il y a forcément plus.
C’est en partant en hike dans les New Territories que j’ai commencé à entrer dans des cha chaan teng, sans même savoir que c’en était. Je goûte un pineapple bun — que j’ai longtemps cru à la banane, comme tout le monde — puis les milk teas, les toasts au pain de mie, les curry fish balls… Et de fil en aiguille, je me suis prise de passion pour tout ça.
Le livre suit le rythme d’une journée, du petit-déjeuner au soir. Pourquoi ce choix ?
Parce qu’ici, il n’y a pas d’entrée/plat/dessert, pas vraiment de saisonnalité non plus. Organiser par moments de la journée était le plus logique — même si, entre nous, on peut manger un pineapple bun au petit-déj ou à 16h.
Vous avez adapté les recettes pour le public français ?
Oui, on a dû en adapter certaine. Par exemple, pour le char siu, tu n’as pas une rôtisserie chez toi ! J’ai tout testé chez moi — toutes les recettes, sans exception. Certaines m’ont rendu folle, comme le mango mochi que j’ai essayé trois fois avant d’obtenir ce que je voulais.
Le char siu est très bon, mais j’aurais aimé mettre une marinade de 48 heures. Pour le livre, on a mis 12h, parce que sinon personne ne le ferait. Quand j’offre le livre à mes amis, je fais une petite note : “Si tu as le temps, fais 48h !”
Comment vous êtes-vous partagées les récits ?
Très naturellement. Davina a grandi ici, donc elle a écrit tout ce qui était profondément culturel : le yum cha, les siu mai, le Dragon Festival… Moi, j’ai pris ce qui était plus documentaire : les hikes, les quartiers que j’ai explorés.
On a aussi choisi de lier chaque récit à une recette : par exemple, Cheung Chau avec le mango mochi, Tai O avec le donut…
Vous avez insisté pour photographier le livre à Hong Kong.
Vous avez adapté les recettes pour le public français ?
Oui, on a dû en adapter certaine. Par exemple, pour le char siu, tu n’as pas une rôtisserie chez toi ! J’ai tout testé chez moi — toutes les recettes, sans exception. Certaines m’ont rendu folle, comme le mango mochi que j’ai essayé trois fois avant d’obtenir ce que je voulais.
Le char siu est très bon, mais j’aurais aimé mettre une marinade de 48 heures. Pour le livre, on a mis 12h, parce que sinon personne ne le ferait. Quand j’offre le livre à mes amis, je fais une petite note : “Si tu as le temps, fais 48h !”
Comment vous êtes-vous partagées les récits ?
Très naturellement. Davina a grandi ici, donc elle a écrit tout ce qui était profondément culturel : le yum cha, les siu mai, le Dragon Festival… Moi, j’ai pris ce qui était plus documentaire : les hikes, les quartiers que j’ai explorés.
On a aussi choisi de lier chaque récit à une recette : par exemple, Cheung Chau avec le mango mochi, Tai O avec le donut…
Vous avez insisté pour photographier le livre à Hong Kong.
Oui, c’était essentiel. Les maisons d’édition préfèrent les studios, les couples photographe/styliste habituels… mais on voulait du vrai.
On a rapporté les plats dans la rue, photographié sur les trottoirs, sur des caisses de polystyrène du marché. Les éditrices ont reçu les premières photos et nous ont dit : “C’est dingue ce que vous avez recréé comme décor !” On leur répond : “Mais… c’est le décor naturel.”
Davina est incroyable : elle peut photographier n’importe quoi, ce sera beau. Et moi je faisais le stylisme, avec un sac énorme rempli de baguettes et d’accessoires.
Pas de compétition entre vous deux ? Davina étant hongkongaise, toi pas…
C’était ma crainte, et pas du tout. Elle n’arrêtait pas de me dire : “Mais tu connais mieux le Hong Kong d’aujourd’hui que moi !” On était super complémentaires, hyper fluides.
Comment es-tu arrivée à écrire et styliser des livres de cuisine ?
On a rapporté les plats dans la rue, photographié sur les trottoirs, sur des caisses de polystyrène du marché. Les éditrices ont reçu les premières photos et nous ont dit : “C’est dingue ce que vous avez recréé comme décor !” On leur répond : “Mais… c’est le décor naturel.”
Davina est incroyable : elle peut photographier n’importe quoi, ce sera beau. Et moi je faisais le stylisme, avec un sac énorme rempli de baguettes et d’accessoires.
Pas de compétition entre vous deux ? Davina étant hongkongaise, toi pas…
C’était ma crainte, et pas du tout. Elle n’arrêtait pas de me dire : “Mais tu connais mieux le Hong Kong d’aujourd’hui que moi !” On était super complémentaires, hyper fluides.
Comment es-tu arrivée à écrire et styliser des livres de cuisine ?
Mes parents cuisinaient tout le temps, donc j’ai grandi dans la bonne nourriture.
J’ai fait des études de langues puis un master de stratégie. J’ai bossé dans une boîte de location de salles où j’étais rédactrice. C’était mon premier pied dans l’écriture.
Quand ils m’ont proposé un CDI, j’ai dit non — je ne me voyais pas derrière un bureau. J’ai quitté mon job, sans plan, en me disant que ma passion pour la bouffe pourrait bien servir à quelque chose.
Je me suis mise au chômage, j’ai commencé un blog, Instagram, j’ai écrit un projet de livre sur les sandwiches qu’on m’a refusé (évidemment, deux ans après les sandwiches étaient tendance). Pareil pour les œufs.
Puis j’ai rencontré une styliste culinaire sur Instagram. Elle m’a expliqué son métier — et là, j’ai su que c’était exactement ça que je voulais faire. J’ai assisté sur des shootings, j’ai bossé pour des éditions, et je suis entrée dans ce milieu d’abord en écrivant des livres de recettes pour Cookeo. J’ai régulièrement des commandes, par exemple je sors bientôt un livre sur les infusions que j’ai pris beaucoup de plaisir à écrire. Les fleurs séchées de Sheung Wan, ma passion !
Tu as d’autres projets de livres en tête ?
Oui, j’ai une destination en tête depuis un moment : la Guyane française. Rien à voir avec Hong Kong ou l’Asie, mais c’est une ville très marquée par les mouvements migratoires et la colonisation — et c’est précisément ce qui m’intéresse. Mon angle serait de montrer comment les migrations du XXe siècle ont influencé la cuisine locale. Je ne sais pas encore si je ferai ce livre tout de suite, mais j’ai vraiment hâte d’aller voir et découvrir ces influences sur place.
Et Hong Kong — un chapitre refermé ou encore ouvert ?
Toujours. Ce n’est pas un rêve que j’ai mis de côté. À chaque fois que je reviens ici, je me sens alignée — vraiment moi-même. Je ne sais pas encore quand, ni comment, mais l’idée de vivre à Hong Kong n’a jamais disparu. Elle est là, quelque part, bien ancrée. Et puis pourquoi pas explorer la ville sous un autre format ?
J’ai fait des études de langues puis un master de stratégie. J’ai bossé dans une boîte de location de salles où j’étais rédactrice. C’était mon premier pied dans l’écriture.
Quand ils m’ont proposé un CDI, j’ai dit non — je ne me voyais pas derrière un bureau. J’ai quitté mon job, sans plan, en me disant que ma passion pour la bouffe pourrait bien servir à quelque chose.
Je me suis mise au chômage, j’ai commencé un blog, Instagram, j’ai écrit un projet de livre sur les sandwiches qu’on m’a refusé (évidemment, deux ans après les sandwiches étaient tendance). Pareil pour les œufs.
Puis j’ai rencontré une styliste culinaire sur Instagram. Elle m’a expliqué son métier — et là, j’ai su que c’était exactement ça que je voulais faire. J’ai assisté sur des shootings, j’ai bossé pour des éditions, et je suis entrée dans ce milieu d’abord en écrivant des livres de recettes pour Cookeo. J’ai régulièrement des commandes, par exemple je sors bientôt un livre sur les infusions que j’ai pris beaucoup de plaisir à écrire. Les fleurs séchées de Sheung Wan, ma passion !
Tu as d’autres projets de livres en tête ?
Oui, j’ai une destination en tête depuis un moment : la Guyane française. Rien à voir avec Hong Kong ou l’Asie, mais c’est une ville très marquée par les mouvements migratoires et la colonisation — et c’est précisément ce qui m’intéresse. Mon angle serait de montrer comment les migrations du XXe siècle ont influencé la cuisine locale. Je ne sais pas encore si je ferai ce livre tout de suite, mais j’ai vraiment hâte d’aller voir et découvrir ces influences sur place.
Et Hong Kong — un chapitre refermé ou encore ouvert ?
Toujours. Ce n’est pas un rêve que j’ai mis de côté. À chaque fois que je reviens ici, je me sens alignée — vraiment moi-même. Je ne sais pas encore quand, ni comment, mais l’idée de vivre à Hong Kong n’a jamais disparu. Elle est là, quelque part, bien ancrée. Et puis pourquoi pas explorer la ville sous un autre format ?